Voyage en Pays basque
Cette mince bande de terre regroupe les stations balnéaires les plus célèbres mais aussi d’adorables villages dans l’arrière-pays. Entre océan et collines, elle est un concentré d’art, d’architecture et de gastronomie.
S’il est un lieu qui fédère les surfeurs et les amoureux du patrimoine et de la gastronomie, les jeunes générations et les anciens, les people et les quidams, c’est bien le Pays basque.Entre ses plages longues ourlées de rouleaux et ses montagnes verdoyantes, ses adresses sélectes mais cool et ses plans de routard, il combine tout ce que l’on peut aimer, au risque de pâtir d’une surpopulation estivale. Ne délaissons pas Biarritz et Saint- Jean-de-Luz, incontournables, mais attachons-nous plutôt à trois autres pépites : Cambo-les-Bains, Hendaye et Anglet.
La première, située à 20 minutes de l’océan, doit sa renommée à la source thermale Honorine, mise à l’honneur par Napoléon III et l’impératrice Eugénie, encore eux. Puis par Edmond Rostand, l’auteur de Cyrano de Bergerac. Aux grands maux les grands remèdes : pour tenter de soigner une pleurésie, il s’y fit construire une villa (la villa Arnaga, aujourd’hui musée), spectaculaire et déroutant empilement de styles. Il est vrai qu’ici, l’air est frais, agréable, la vue sur ses généreuses collines gorgées d’eau, admirable. Un paradis vert et ondoyant, dont on dit ici que son microclimat est « toni-relaxant ». En d’autres termes, il convient à tout le monde, aux curistes comme aux amoureux de la rando. Ces derniers ne rateront pas la très belle balade sur la colline de la Bergerie. Nul besoin d’avoir un temps clair pour y voir la Rhune, montagne la plus célèbre du Pays basque. Un GR relie aussi Cambo-les-Bains au village de Sare, labellisé parmi les « plus beaux villages de France ». En surplomb de la rivière Nive, le Haut-Cambo séduit par ses maisons traditionnelles basques, les « Etxea », avec leurs façades blanchies à la chaux et leurs colombages colorés. Chaque année, en septembre, le village fête le gâteau basque dont il revendique l’origine. Au pays, on apprécie en effet les bonnes choses : la charcuterie bien sûr, les piments, mais aussi le chocolat, importé dans la région par les Juifs espagnols au XVIIe siècle, comme le raconte Christophe Puyode-bat, artisan chocolatier passionné, dans son atelier-boutique-musée ‒ qui vaut une visite. Tout comme la ferme de Biperduna, plantée à flanc de colline, où rougissent biologiquement les piments d’Espelette. Maialen, 66 ans, enfant du pays, n’en revient pas de la richesse retrouvée de sa terre. « Il y a trois ans, quand nous sommes passés à la permaculture, on nous a pris pour des fous ! Aujourd’hui, quelle satisfaction de faire pousser nos légumes et nos piments sans produits chimiques, grâce l’humus de nos terres et à l’eau que nous retenons par tous les moyens naturels », témoigne celle dont l’énergie force le respect.
À 40 minutes à peine de Cambo, changement d’ambiance : Hendaye vous conte la naissance du tourisme des bains de mer, au début du XXe siècle, avec son étonnant casino de style mauresque (1884), son superbe hôtel de luxe, L’Eskualduna, et ses maisons de « style néo-basque », aux colombages « sang de bœuf » dessinées par Edmond Durandeau. « Une fierté de la ville ! » souligne notre guide. C’est qu’ici, son superbe ruban de sable blond se déroule sur plus de 3 km jusqu’aux rochers des Deux Jumeaux. Lovée au creux d’une anse, cette plage possède l’immense avantage d’être abritée des rouleaux. On s’y baigne donc à loisir…
À un jet de pelote, de l’autre côté du fleuve Bidassoa, c’est l’Espagne et la petite ville d’Hondarribia que l’on rejoint par le bac. À l’autre extrémité, le Château Observatoire d’Abbadia, de style néogothique, construit par Viollet-le-Duc, permet d’admirer toute la baie. À proximité, le Domaine d’Abbadia, site naturel protégé, se prête à une balade bucolique de 6 km entre falaises, landes basques, sous-bois et prairies fleuries parsemées de gros moutons chevelus ! À 15 km d’Hendaye, en remontant la côte, le typique village de Guéthary, « plus petit » de la côte Atlantique, et son mini port de pêche méritent un arrêt pour profiter du soleil couchant depuis La Terrasse. Puis c’est Anglet qu’on apprécie pour ses innombrables plages à perte de vue. L’océan prend ici toute sa vigueur et séduit les surfeurs du monde entier. Mais Anglet joue aussi la carte culturelle avec sa nouvelle galerie Georges-Pompidou, inaugurée en mai 2023 par une exposition de Daniel Buren. On ne manquera pas non plus la Villa Beatrix Enea, qui expose une partie de la belle collection d’art contemporain que détient la ville. Grâce à ses pistes cyclables, Anglet se sillonne facilement, entre l’océan, la forêt du Pignada et l’Adour, la rivière qui la sépare de Bayonne. Ses restaurants-paillotes sur la plage, où l’on déguste une délicieuse cuisine faite de chipirons et autres produits locaux, constituent autant de spots pour observer les prouesses des surfeurs. Et pour ceux qui recherchent un havre dans un cocon de verdure, une superbe bâtisse, le château de Brindos, construite par un Ecossais fortuné dans les années folles, a été récemment rénovée : à la fois hôtel, restaurant, bar et spa, on s’y pose avec bonheur pour savourer un verre de blanc sur la terrasse donnant sur un lac. Loin du ressac de l’océan, la magie opère instantanément.
Valérie Sarre